
"Darius mourant dans les bras d'Alexandre, alors que ses deux assassins sont pendus. Extrait du Livre des Augures. 1550-60"
144
Hélas ! mon cœur n'a pu trouver aucun remède à ses douleurs ; mon âme est arrivée au bord de mes lèvres sans avoir atteint l'objet de mon amour. Hélas! ma vie s'est passée dans l'ignorance, et l'énigme de cet amour n'a point été expliquée.
145
Dans les régions de l' âme, il faut marcher avec discernement;
sur les choses de ce monde il faut être silencieux.
Tant que nous aurons nos yeux, notre langue, nos oreilles,
nous devons être sans yeux, sans langue, sans oreilles.
146
En ce monde, celui qui possède la moitié d'un pain et
qui peut abriter son individu dans un nid quelconque, celui
qui n'est ni le maître, ni le serviteur de personne, dis-lui de
vivre content, car il possède une bien douce existence.
147
On ne doit pas planter dans son cœur l'arbre de la tristesse.
On doit, au contraire, feuilleter toujours le livre de l'allégresse.
0n doit boire du vin, on doit suivre le penchant de son cœur,
car, vois, la longueur du temps que tu as à rester dans ce
monde est prompte à mesurer.
148 Ton empire a-t-il gagné en splendeur par mon obéissance,
ô Dieu, et mes pèches ont-ils retranché quelque chose de ton
immensité ? Pardonne, Dieu, ne punis pas, car, je le sais,
tu punis et tu pardonnes tôt.
149 Il serait fâcheux que ma main, habituée à saisir la coupe,
prît le dèftèr et s'appuyât sur le mèmbèr. Toi, c'est différent,
tu es un dévot sec, tandis que moi, je suis un dépravé humecté
par la boisson et je ne sache pas que le feu puisse enflammer le liquide.
150 Sur la terre, personne n'a étreint dans ses bras une charmante
aux joues colorées du teint de la rose sans que le temps ne soit
venu d'abord lui planter quelque épine dans le cœur. Vois plutôt
le peigne : il n'a pu parvenir à caresser la chevelure parfumée de
la beauté qu'après avoir été découpé en une foule de dents.
151 Puissé-je avoir constamment dans ma main du jus de la
vigne ! Puisse mon amour pour ces belles idoles, semblables
aux houris, ne jamais tarir dans mon cœur ! On me dit :
Dieu t'ordonnera d' y renoncer ; oh ! me donnât-il un ordre
pareil, je n' obéirais pas. Loin de moi cette pensée !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire